La loi sur les enquêtes privées du 18 mai 2024 (ci-après dénommée « WPO ») est en vigueur depuis le 16 décembre 2024. La proportionnalité, l'intérêt légitime et la protection des données (RGPD) sont au cœur de cette réglementation. Dans cet article, nous expliquons les conséquences pour les employeurs.
Mener une enquête en tant qu’employeur ? des règles s’appliquent !
Les employeurs peuvent disposer de diverses raisons pour enquêter sur un employé, telles que la fraude, le vol, la falsification de rapports ou d’enregistrements du temps de travail, l’absentéisme pour cause de maladie, la concurrence déloyale ou le débauchage de personnel.
La LPR réglemente la collecte et l’utilisation de preuves. Si la loi n’est pas respectée, les preuves obtenues pourront être déclarées irrecevables. De plus, la LPR prévoit l’octroi de lourdes amendes administratives en cas d’infractions.
Enquête externe, service interne ou enquête interne ? La LPR s’applique
En tant qu’employeur, vous pouvez faire réaliser une enquête par :
- Un enquêteur privé externe
- Un service interne de recherche privée (une cellule interne structurée)
- Une approche interne ponctuelle (enquête unique ou non structurée au sein de l’entreprise)
Dans les deux premiers cas, toutes les dispositions de la LPR s’appliquent. Cela signifie notamment que l’enquêteur privé ou le service interne doit disposer d’une licence, de cartes d’identification et d’un délégué à la protection des données (DPO). Mais même sans service de recherche privé interne ou externe, la LPR reste pertinente. De nombreuses dispositions s’appliquent à toute enquête interne.
Réglementation interne obligatoire d’ici le 16 décembre 2026
À partir du 16 décembre 2026, un employeur ne pourra faire mener une enquête sur un employé que s’il a mis en place un règlement interne autorisant explicitement la recherche privée et précisant ses modalités. Une politique interne est l’instrument le plus adapté à cet effet. Ce règlement doit :
- être élaboré en concertation sociale (conseil d’entreprise ou délégation syndicale)
- être aligné sur les règlements internes existants (par exemple, vidéosurveillance, contrôle des e-mails et d’internet).
Règles strictes pour les méthodes d’enquête
La LPR fixe des limites claires aux méthodes pouvant être utilisées lors d’une enquête, y compris lorsqu’elle est menée en interne. Vous trouverez quelques exemples de ces règles strictes.
Ce qui est interdit : observations dans des lieux où la vie privée est protégée, provocation, subterfuges, infiltration, enquête sur des domaines sensibles, utilisation de moyens de géolocalisation lors d’une observation, actes d’enquête sans consentement écrit lorsque requis par la LPR.
Obligations strictes en matière d’entretiens :
- Un consentement écrit de la personne interrogée est requis.
- L’interrogé doit être informé au préalable de ses droits et de l’objectif de l’entretien.
- Un rapport écrit doit être établi et une copie doit être remise à l’employé.
- L’employé a le droit d’être assisté par une personne de son choix (délégué syndical, avocat, etc.)
Les méthodes telles que la coercition verbale, les menaces, la manipulation psychologique ("good cop - bad cop"), les promesses vides et les pressions sont interdites. En revanche, sont autorisées :
- la confrontation avec d’autres éléments de preuve
- l’interrogation approfondie
- la mise en évidence des incohérences dans les déclarations de l’employé.
Obligations administratives : documentation appropriée
Ordre d’enquête et dossier d’enquête
Un employeur et une entreprise externe de recherche privée doivent signer préalablement un document précisant l’objet de l’enquête et reprenant certaines mentions obligatoires. En cas d’enquête menée par un service interne, un registre des missions doit être tenu, avec un nombre plus limité de mentions obligatoires. À partir de l’ordre d’enquête ou du registre des missions, un dossier d’enquête doit être établi avec un aperçu chronologique des étapes de l’enquête.
Rapport d’enquête et notification à l’employé
L’enquêteur doit remettre un rapport d’enquête à l’employeur dans le mois suivant le dernier acte d’enquête. En cas d’urgence, un rapport oral peut être présenté, mais il doit être rapidement complété par un rapport écrit.
Si l’employeur décide d’agir sur base des informations contenues dans l’enquête, il doit en informer l’enquêteur dans un délai de 30 jours après réception du rapport final. Ensuite, l’enquêteur doit informer par écrit l’employé concerné et toute autre personne identifiable sur le déroulement de l’enquête. Ce n’est qu’après cette notification que l’employeur peut utiliser les informations.
Le délai de trois jours pour un licenciement pour motif grave reste d’application
Un licenciement pour motif grave doit toujours être notifié dans un délai de trois jours ouvrables après la prise de connaissance des faits. Ce délai reste inchangé sous la LPR.
Points d’attention importants pour les employeurs :
- Respectezstrictement les règles relatives aux entretiens lors d’un interrogatoire d’un employé.
- Déterminez à l’avance une durée réaliste pour l’enquête et mentionnez correctement la date de début et de fin dans les documents émis.
- Définissez, à l’avance, qui recevra les rapports intermédiaires et finaux. Si la personne habilitée à licencier reçoit un rapport, cet élément peut déclencher le délai des trois jours susmentionnés.
- Faites preuve de prudence avec les rapports intermédiaires. En effet, si des faits concrets sont communiqués, le délai de trois jours peut déjà commencer à courir. Il peut être judicieux de ne pas prévoir de rapport intermédiaire.
- Planifiez soigneusement la communication : le rapport d’enquête ne peut être utilisé qu’après que l’employé a été correctement informé, mais le délai des trois jours n’est pas suspendu jusqu’à ce moment. En conséquence de quoi, une planification rigoureuse et une coordination précise sont requises.
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