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#Estate planning #Successieplanning #Droits De Succession

Planifier une succession en rendant mobiliers des biens immobiliers

25/10/2024 | Temps de lecture : 5 minutes

En 2024, la Belgique reste toujours championne du monde de l'imposition des revenus du travail. Il n'est donc pas illogique de réfléchir à une planification successorale. Vous pouvez, par exemple, optimiser fiscalement le transfert de biens immobiliers par le biais de votre société. À quoi devez-vous faire attention ?

Comment pouvez-vous optimiser le transfert de biens immobiliers ?

Le transfert direct de biens immobiliers par donation est soumis à des taux progressifs. Même en ligne directe (p. ex. à votre enfant), ces taux peuvent s'élever jusqu'à 27 % si la donation a une valeur supérieure à 450 000 euros.

Ces taux sont en contradiction flagrante avec la donation de biens mobiliers. Quelle que soit leur valeur, ces derniers sont en effet taxés à 3 % lors d'une donation en ligne directe ou entre partenaires. Ce taux peut même être de 0 % s'il s'agit d'actions de sociétés dites « familiales ». En lire davantage à ce sujet ici.

La technique de planification suivante vous permettra de rendre un bien immobilier mobilier et de réaliser ainsi une économie d'impôts considérable :

  • Il vous faut d'abord apporter le bien immobilier dans la société. Le droit de vente flamand de 12 % s'applique lorsqu'il s'agit de biens immobiliers à destination résidentielle ; le droit d'apport fédéral de 0 % s'applique quand il s'agit de biens immobiliers commerciaux. 
  • Vous faites ensuite don des actions nouvellement émises à un taux forfaitaire de 3 % (ou de 0 %, voir plus haut).

Ce taux est donc nettement inférieur à celui d'une donation directe d'un bien immobilier aux taux progressifs.

Attention à l'abus fiscal

Si vous voulez être certain que cette technique ne pose aucun problème sur le plan fiscal, vous pouvez vous adresser à l'administration fiscale flamande (Vlabel) pour demander un ruling. Le Vlabel examine en effet cette technique d'un œil particulièrement critique.

En tant que contribuable, vous devez faire preuve de vigilance. Ce ne sont pas les opérations successives qui posent problème. Mais en raison de l'importante économie d'impôts, le Vlabel considère que, dans un certain nombre de cas, cette technique constitue un abus fiscal.

Il peut alors y avoir de lourdes conséquences. Dans ce cas, toute la construction de l'apport du bien immobilier suivi de la donation des actions n'est pas opposable au Vlabel. Le fisc flamand agira comme si le bien immobilier avait été directement donné dès le départ et réclamera donc le droit de donation élevé.

Partage de la charge de la preuve

L'existence d'un abus fiscal est déterminée selon un schéma clair : une preuve d'un élément « objectif » apportée par le fisc, et toute preuve contraire d'un élément « subjectif » apportée par le contribuable.
 

  • Le fisc doit d'abord prouver que votre acte juridique est contraire au but et à la portée de la loi fiscale. Il s'agit de l'élément « objectif » de l'abus fiscal. Dans le cas présent, il s'agit d'un ensemble d'actes juridiques, à savoir l'apport et la donation. 
  • Si cette preuve est fournie, vous pouvez apporter une preuve contraire et démontrer que les transactions avaient des motifs autres que fiscaux. Il s'agit de l'élément « subjectif » de l'abus fiscal. Vous devez démontrer que le but essentiel n'était pas d'obtenir un avantage fiscal. Si vous n'y parvenez pas, il sera question d'abus fiscal.

Pratique de ruling

Le Vlabel a déjà rendu plusieurs rulings sur le fait de « rendre mobilier un bien immobilier ». Nous pouvons en tirer quelques enseignements concernant l'élément objectif du côté du Vlabel et l'élément subjectif du côté du contribuable.

Modération  non autorisée des taux progressifs

Selon le Vlabel, il est satisfait à l'élément objectif d'abus fiscal parce que la progressivité de l'impôt normal est rompue lorsqu'un bien immobilier fait l'objet d'une donation « directe ». À plusieurs reprises, la Cour d'appel de Gand a déjà suivi le Vlabel dans ce raisonnement.

Unité d'intention

Rendre mobilier un bien immobilier requiert un ensemble d'actes juridiques (apport et donation). Le Vlabel doit prouver l'unité d'intention entre les deux en vue de réaliser l'avantage fiscal. Cela est plus difficile à faire quand un laps de temps (p. ex. 2 ans) s'est écoulé entre les actes juridiques, que lorsqu'ils sont rapidement intervenus l'un après l'autre.

L'avantage fiscal n'est pas le but essentiel

Même si le Vlabel peut prouver cet élément objectif, vous avez toujours la possibilité, en tant que contribuable, de fournir une preuve contraire. Vous devez alors démontrer que l'avantage fiscal n'était pas le but essentiel. Un seul autre motif suffit déjà en soi pour ne pas appliquer la disposition anti-abus. Le motif doit toutefois être suffisamment important.

L'absence d'avantage fiscal signifie donc aussi l'absence d'abus fiscal. Veillez à vérifier au préalable si vous ne pouvez pas faire don du bien immobilier concerné qui deviendrait mobilier, à 0 % dans le cadre du régime favorable aux entreprises familiales.

Motifs non fiscaux

En tant que contribuable, vous pouvez également démontrer, comme une preuve contraire, que vous effectuez les transactions pour des raisons autres que le contournement des droits d'enregistrement progressifs. Le cas échéant, il convient toutefois d'être bien préparé.

Voici quelques motifs non fiscaux possibles :

  • Gérer et rentabiliser de façon optimale le patrimoine familial 
  • Corriger des inégalités historiques
  • Éviter que des avoirs fassent l'objet d'une sortie d'indivision
  • Séparer les intérêts de la famille et ceux de la société
  • Continuer à utiliser le bien immobilier dans le cadre de l'activité économique de la société
  • Faire fusionner les actifs de l'entreprise en vue d'une gestion consolidée et centralisée

Affectio societatis

Et enfin, le Vlabel semble aussi prêter attention à la notion d'affectio societatis, lorsqu'il s'agit de rendre mobilier un bien immobilier. Le fisc flamand indique ainsi à plusieurs reprises qu'« il convient d'examiner si l'intention des apporteurs/donateurs est effectivement de soumettre le bien immobilier apporté au risque entrepreneurial ». Le Vlabel tente ainsi d'exclure la possibilité d'une simple donation du bien immobilier au bénéficiaire des actions.

Le Vlabel y a vu un signal d'alarme :

  • Le fait que le demandeur n'apporte le bien immobilier dans la société qu'à un âge avancé.
  • Le fait que la maison familiale soit apportée dans la société et qu'aucun revenu ne soit donc généré par la société. Pour le Vlabel, les motifs non fiscaux avancés étaient insuffisants pour constituer une preuve contraire. L'abus fiscal a donc été retenu.

Demandez un rulling à l'avance

Si vous envisagez cette technique de planification, vous pouvez obtenir une certitude totale en demandant à l'avance un ruling au Vlabel.  Votre histoire est-elle concluante, la transaction envisagée n'a-t-elle rien d'artificiel et tout est-il parfaitement défendable dans le cadre des activités commerciales existantes ? Il y a alors de fortes chances que vous receviez un avis positif du Vlabel.

Si vous avez des questions ou si vous envisagez cette technique, nous nous ferons un plaisir d'examiner la situation avec vous.

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